Cuisine coréenne : quelques repères et un déjeuner chez Pierre Sang

Table repas cuisine coreenne
Table repas coréen (crédit photo Korean Food Foundation)
Aujourd’hui nous allons loin avec une cuisine qui pour moi était presque méconnue jusqu’à il peu temps mais que j’ai redécouvert et qui m’a beaucoup plu : la cuisine coréenne. Avant de vous proposer une recette, je souhaitais vous livrer quelques points de repères (pour moi surtout) pour la comprendre… même si, comme pour chaque cuisine, on pourrait en écrire des livres. Plus bas, vous avez donc quelques éléments sur les structure du repas, les ingrédients et les plats phares de la cuisine coréenne… sur des milliers. Au fond, comme beaucoup de cuisines orientales, elles sont millénaires, imprégnées de traditions profondes, rites et d’ingrédients, façon d’approcher la cuisine très différente de la nôtre. 
Nous sommes nombreux à être fascinés par la cuisine d’ailleurs et notamment les cuisines extrême-orientales. Qu’elles soient chinoises, japonaises, thaïlandaises, indiennes, vietnamiennes…. et même coréenne (une cuisine qui devient très à la mode notamment aux États-Unis, côte ouest 😉
Mais j’avoue aussi que notamment pour la cuisine coréenne c’est un terrain qui ne m’est pas familier… je dirais même plus, jusqu’à peu je n’en savais presque rien (et oui :-). 
La seule fois où nous avons été dans un restaurant coréen à Paris, ce fut assez comique et je ne me souviens presque pas de ce que nous avons mangé (c’est dire :-).

Je me souviens surtout que nous avions pris le menu soi-disant le plus traditionnel où au moment du plat, il fallait, sur des plaques brûlantes, cuire ou griller sa propre viande et ses fruits de mer. Nous étions un peu perplexes devant cette plaque, dehors il neigeait et nous, dedans, en sueur et en T-shirt en essayant de tout bien cuire (et ne pas nous brûler). À un certain moment, mon mari un peu énervé me dit “Bon, en principe je ne viens pas au restaurant pour cuisiner mon repas”. Il avait raison. Et aujourd’hui nous évoquons cette épisode en riant mais depuis… nous ne sommes plus allés dans un restaurant coréen.

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Cuisine coréenne (crédit photo Korean Food Foundation) 
Il y quelques temps, j’ai été invitée par la Korean Food Foundation et sa Présidente Yang Il-sun (ils font un travail très intéressant pour faire connaître cette cuisine dans le monde, vous avez aussi des bonnes adresses sur le site). Le but était de découvrir (un peu) la cuisine coréenne avec, entre autres, un déjeuner chez le jeune chef, joyeux et talentueux, Pierre Sang Boyer (restaurant que je vous recommande).
Je me suis dite que c’était une bonne occasion pour goûter autre chose que la chaleur de la plaque 😉 Et en effet tout un monde s’est ouvert à moi. L’évènement fut bref, nous avons très bien mangé (c’était raffiné, plutôt de la cuisine créative) mais surtout en rentrant la curiosité était née. Je me suis mise donc à chercher, lire (notamment le petit livre offert Histoires Savoureuses autour de la cuisine coréenne), faire un tour chez Tang Frères, interroger mon primeur (bon il est chinois 😉 et j’y ai découvert tout un univers. 
Une belle cuisine, avec beaucoup de légumes (frais ou fermentés), du riz forcément, des pâtes, des soupes, des viandes savoureuses… Des plats équilibrés et plein de saveurs assez fraîches (ail, piment, gingembre, ciboule)… Et après avoir peut-être compris un peu quelque chose, je me suis mise en cuisine. Même si je pense que pour s’imprégner d’une cuisine qui ne nous est pas propre il faut du temps, il faut goûter, comparer et… aller sur place 🙂
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Accompagnements dans la cuisine coréenne (crédit photo Korean Food Foundation) 
Voici donc ce que j’ai retenu (et si vous avez d’autres éléments, sources, je suis preneuse, le mécanisme s’est enclenché 🙂
Caractéristiques de la cuisine coréenne
C’est une cuisine avec une très longue tradition (comme la chinoise ou l’Indienne par exemple), marquée par le calendrier (nouvel an…), le culte des ancêtres, des fêtes religieuses. C’est une cuisine liée à l’art de table qui même dans sa simplicité peut être raffinée (je trouve que c’est un élément commun à beaucoup de cuisines orientales).
La cuisine est également grandement influencée par sa situation géographique. C’est une péninsule qui jouit de quatre saisons (ce qui n’est pas le cas de tous les pays alentours) : la cuisine se fait donc au rythme des divers ingrédients disponibles le long de l’année. 
Par ailleurs, c’est une cuisine très régionale et familiale aussi : dans chaque endroit et famille vous dégusterez un plat différent.
Structure du repas coréen
Comme dans beaucoup de pays non occidentaux, tous les plats sont servis en même temps sur une table. Il y a même des tables thématiques : celle des boissons, des accompagnements, des pâtes, des kimchi…, des soupes… C’est un repas très varié (féculent, légumes, protéines…) et équilibré.
Traditionnellement chacun mange sur une petite table individuelle, avec des baguettes et une cuillère (pour les soupes). Le riz, incontournable, est placé à droite et la soupe à gauche.
Autre caractéristique qui m’a frappée : le nombre de plats (cheopsu dérivé du récipent cheop) qui varie en fonction de l’importance de l’occasion. Il peut y avoir trois, cinq, sept, neuf ou douze plats (dans ce dernier cas c’est pour le repas du roi :-). Et dans ce calcul ne sont pas pris en compte les accompagnements comme les soupes par exemple. Du coup même avec un repas qui peut sembler frugal, on mange bien et varié.
Ingrédients et plats typiques de la cuisine coréenne
1. Beaucoup d’ingrédients nous sont familiers. Dans les légumes nous avons le chou, le navet, le concombre, la pomme de terre. Puis les viandes de boeuf, de porc, le poulet mais aussi les poissons ou les fruits de mer comme le poulpe, la lotte, le maquereau, les huîtres… Mais ils sont cuisinés et assaisonné des manière si différente qu’on les redécouvre presque.
Côté féculent on retrouve bien sûr le riz, le Bap, un accompagnement incontournable seul (à la vapeur) ou sauté avec des légumes (Kimchi bokkeum bap) ou enroulé dans des feuilles d’algue (Gimp bap) ou même de légumes. On le retrouve aussi en version soupe-bouillie (Jat guk) et sous forme de rondelles de pâte de riz (étrange et délicieuse texture) que l’on met généralement dans le pot au feu du nouvel an (Tteok Guk).
Et puis il y a les pâtes (hi hi) ou plutôt les nouilles. Longues, fines au blé tendre ou ou sarrasin ou soja et même en version ravioli (mandu).
Côté légumes, ils sont général cuits, souvent fermentés, (le fameux kimchi de chou fermenté). Apparemment la fermentation (ancienne méthode de conservation) est très bonne pour la santé. Certains disent même qu’ils en prennent avant l’hiver et ne sont pas malades après. Je vous avoue que j’avais quelques réticences sur le goût mais en réalité c’est très bon ! Une saveur complexe (qui change au fil du temps: plus c’est fermenté plus c’est fort et un peu acide) forte mais aussi des parfums très agréables. Cette méthode enrichi le goût d’un simple légume. Il y a également une grande tradition de légumes ou fruits saumurés (jeaotgal).
Parmis les ingrédients très utilisés il y a l’huile de sésame, le piment coréen (souvent la cuisine coréenne est associée à une cuisine très pimentée alors qu’il paraît que c’est un phénomène assez récent), de l’ail (les coréens semble-t-il sont parmi les premiers consommateurs d’ail au monde), la ciboule (oignon nouveau plus petit), le sésame, le gingembre…
2. Concernant les plats, il en existe des milliers (comme dans presque toutes les cuisines y compris celle française ou italienne ;-). Disons qu’en général les viandes et les poissons sont bouillis (comme le porc ou le poulet), mijotés, grillés, sautés mais aussi servis dans des bouillons (jeongol) pour avoir ainsi un plat complet.
Les pâtes aussi sont souvent cuites dans des bouillons de viande ou de poisson mais elles peuvent être également servies sautées avec des légumes. 
Plats et accompagnement phares :
Tteok guk : pot au feu du nouvel an avec des rondelles de pâte de riz. Un plat symbolique aussi et qui est vraiment très bon, linéaire, réconfortant
– Bap (riz), Guksu (nouilles coréennes) et Mandu (ravioli coréens)
Jeongol : cassolette de viande, fruits de mer, champignons…
– Jeon : galette de légumes ou fruits de mer frits
Kimchi : légumes assaisonnés et fermentés
Pajeon : galette-pancakes avec de la ciboule et des fruits de mer
Bibim bap : riz aux légumes et à la viande
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Pierre Sans Boyer (crédit photo Korean Food Foundation)
Enfin si vous voulez goûter à une bonne cuisine créative coréenne (et un peu fusion) dans un cadre détendu (seul problème ils ne prennent pas de réservation) et pour un prix raisonable, vous pouvez aller chez Pierre Sang.
J’ai eu un grand coup de coeur pour son gâteau de riz à la coréenne servi avec du homard et pour son entrée à base d’épinards sautés, pommes, huîtres et grenade (beaucoup de parfum et de fraicheur). Petit hic : les portions sont normales (peut-être pas passez grandes pour des gros mangeurs 😉
55, rue Oberkampf
75011 Paris
(du mardi au vendredi)
Et vous connaissez-vous cette cuisine, avez-vous déjà été en Corée, quels sont les plats qui vous ont frappé ?

8 réflexions au sujet de “Cuisine coréenne : quelques repères et un déjeuner chez Pierre Sang”

  1. Bien décrit la cuisine coréenne assez détaillé. Elle est proche et différente de la cuisine de ses voisins, plus solaire et masculine que la japonaise. Plus humide et légère que la chinoise.
    Il est vrai que l'on mange bien chez Pierre Sang, mais c'est la fusion. Pour la traditionnelle, il y a une centaine de restaurant coréens à Paris à découvrir (bien sûr qu'ils ne sont pas tous bon)
    Vous lirez aussi dans mon blog d'autres informations que la Fondation coréenne n'a pas le temps de communiquer.

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    • Merci beaucoup Luna pour votre message qui m'éclaire encore plus (vous décrivez si bien cette cuisine ;-). je suis d'accord : Pierre Sang c'est plutôt de la cuisine créative.
      Votre passage m'a par ailleurs permit de découvrir votre blog qui est un vrai plaisir !

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  2. J'aime beaucoup la cuisine coréenne, saine, assez simple et délicate. C'est un régal autant pour les yeux que pour les papilles.
    J'y ai d'ailleurs mangé ce samedi, un Bibimbap végétarien. Un régal!

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  3. Pour quelqu’un qui affirme avoir découvert la cuisine coréenne récemment, vous la présentez très bien ! En particulier, votre travail de documentation est sérieux.

    À propos du kimtchi

    C’est aujourd’hui un condiment incontournable dans la cuisine coréenne.

    Mais, il y a moins de 100 ans, c’était l’aliment indispensable : en effet, l’hiver coréen est long et rude et, tant que la Corée ne s’était pas modernisée ni développée (en Corée du Sud, 70 % de la population vivait à la campagne en 1960, contre moins de 20 % en 2020 et qui ne sont pas tous des agriculteurs), il n’y avait quasiment pas de légumes ni fruits frais pendant 3 ou 4 mois, sauf chez les riches. Le kimtchi représentait la seule source de vitamines pour échapper au scorbut, souvent mortel, et aux autres conséquences dramatiques du manque de vitamines. Le kimtchi était préparé en octobre en quantités massives pour durer jusqu’en mars : on le mettait à fermenter et on le conservait dans des grands pots en terre cuite qui étaient enterrés au 2/3 dans la cour de la ferme.
    NB : de nos jours, beaucoup de Coréens continuent à préparer d’importantes quantités de kimtchi pour leur consommation personnelle au sein de la famille au sens élargi (la mère apportant des produits maison, dont du kimtchi, à sa fille ou belle-fille est une scène récurrente dans les dramas coréens) : à cette époque, y compris dans les grands magasins, les ingrédients nécessaires (chou chinois, poissons séchés, piment coréen, etc.) se vendent parfois par 10 ou 20 kg. Et dans le monde rural, il arrive encore que le kimtchi se prépare en groupe, notamment familial, ce qui constitue un moment fort de la vie sociale.
    Mal préparé, le kimtchi risquait de s’aigrir (NB : même bien préparé, le kimtchi mis à fermenter en octobre est moins bon en mars qu’en décembre), voire de se gâter au point d’être immangeable, accident aux conséquences catastrophiques dans la Corée d’autrefois. On dit que, chez les paysans, un des critères de choix d’une épouse était sa maîtrise de la préparation du kimtchi.
    NB : dans la Bretagne rurale d’autrefois, c’était la même chose pour les galettes de blé noir, base de l’alimentation.

    Plus généralement, même s’il existe des plats plus « luxueux », la cuisine coréenne est traditionnellement – comme la française d’ailleurs, mais dans un style différend – une cuisine paysanne dans laquelle les soupes et les ragoûts tiennent une place importante, ce que j’ai constatai en mangeant chez des Coréens : comme toujours, on ne trouve pas dans les restaurants à l’étranger la plupart de ces plats familiaux. J’avais noté la faible quantité de viande, notamment de bœuf, et l’utilisation encore actuelle de « bas morceaux », comme la queue de bœuf avec laquelle, si elle est de qualité et bien , on obtient un excellent bouillon « de base » de couleur blanche nacrée…

    Bravo pour votre excellent blogue, notamment les recettes italiennes qui respirent l’authenticité : Grazie mille !

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